Au temps où l’on s’attendait a ce que les deux communes de Oualidia et Ayer travaillent d’arrache-pied pour soigner et protéger leurs environnements, les élus et les décideurs sont allés a l’encontre de la logique en défigurant les paysages, particulièrement ceux des plages. Mais le temps de l’anarchie est révolu étant donné que, grâce a la nouvelle vision instaurée par S.M. le Roi Mohammed VI, la société civile a maintenant son mot a dire.
Et, dans cette vision, les habitants et les natifs de la commune rurale de Ayer, province de Safi, ont signé une pétition pour protester contre ces affreux ravages. En même temps, par cette réaction de leur part, ils attirent aussi l’attention sur ce qui se passe a Oualidia comme actes inadmissibles.
Le Discours Royal du 10 janvier 2001, édifiant pour une nouvelle politique touristique, qui érige le tourisme en priorité nationale, constitue sans doute une rupture avec les politiques antérieures relatives a cette activité. La Vision 2010 avait ainsi tracé un programme ambitieux pour concrétiser les orientations de S.M. le Roi a la lettre.
Malheureusement, au moment où toute l’attention se concentre sur les grands projets touristiques (Saïdia, Mazagan, Mogador, etc.), des sites balnéaires magnifiques sont délaissés, sans prévoir la moindre mesure pour les restructurer ou au moins les protéger. Ils sont laissés a la merci des collectivités locales qui ne semblent pas apprécier leurs valeurs comme assise fondamentale du développement durable et de la lutte contre la pauvreté, surtout que ces communes sont situées en milieu rural.
«De même, le développement harmonieux du tourisme a l’échelle de l’ensemble du territoire national reste tributaire de l’adoption de l’approche régionale et de l’implication des opérateurs, des élus, des organisations professionnelles, des autorités locales et des compétences régionales dans la promotion du tourisme local.
Nous insistons également sur le rôle des collectivités locales dans l’encouragement des activités touristiques en veillant a la propreté de l’environnement, a l’esthétique de l’espace et a l’organisation d’activités récréatives permanentes qui rendent agréable et plaisant le séjour dans nos villes et nos campagnes».
(Discours Royal du 10 janvier 2001. Il semble également que ces mêmes responsables n’avaient pas suffisamment saisi les orientations Royales relatives a l’INDH : «Tout en veillant a ce que chacun demeure constamment imprégné de ces vertus et de leurs bienfaits louables, nous estimons que le développement efficace et durable ne peut se concrétiser que par le biais de politiques publiques intégrées, s’inscrivant dans le cadre d’une entreprise cohérente, d’un projet global et d’une forte mobilisation tous azimuts, ou les dimensions politique, sociale, économique, éducationnelle, culturelle et écologique se conjuguent et se complètent».
(Discours Royal du 18 mai 2005) Parmi les communes qui illustrent ce grave phénomène, celles de Oualidia et d’Ayer, qui sont limitrophes et séparées uniquement par les frontières administratives entre Doukkala et Abda. Pour Oualidia, malgré son histoire avec le tourisme, le développement de ce village est laissé au chaos depuis bien longtemps. Les eaux usées sont déversées partout dans les rues ou dans une mare juste a coté du camping (international).
La lagune est étouffée par les résidences privées ; le seul projet touristique digne de ce nom (le complexe touristique Chems) est fermé depuis longtemps pour des raisons inconnues ; même le petit bois qui bordait la grande plage, constituant le dernier rescapé du long processus de défiguration du paysage du littoral depuis le départ des Français, a été déraciné et ses sables ravagés, donnant lieu a d’autres marécages favorisant les saletés et les moustiques.
Pour la voisine Ayer, sa situation n’est pas encore dramatique, puisque rien n’est encore fait. Sa plage «Sidi Kourram Eddaïf» pourra être sauvée d’un processus destructif similaire. En février dernier, le conseil communal a voté a l’unanimité la cession de 20 ha des terres en collectives (englobant les terrains agricoles des «ignorants-pauvres» qui ne les ont pas titrés) a l’ERAC pour en faire un prétendu projet touristique.
Un lotissement qualifié de «panoramique», qui va enterrer ce qui reste du panorama de cette petite plage : ses sables dorés ont déja été volés par les conseils précédents durant les années 80, en plein jour au soleil br»lant, sans que personne ne bouge le petit doigt. Ses sables étaient tellement abondants que remorques et bulldozers, travaillant jours et nuits, ont mis plus de sept ans pour les exterminer. Un tel projet n’est pas compatible avec les politiques nationales en matière de tourisme et d’économie sociale.
Il va défigurer la plage tout en la transformant en un club privé, sans tenir compte des paramètres socio-économiques de cette région : cette petite bande de terres fertiles (n excédant pas 70 ha), pouvant résister aux vagues de sècheresse les plus ardues, constitue la seule source de survie pour plus de 1.000 familles du douar en face (Hyout Chaîre) qui n’ont pas encore réussi a trouver une destination pour effectuer un exode en masse. Il est a remarquer que les ancêtres de ce village, avant l’invention du plan d’aménagement, avait choisi de se loger loin des terres agricoles pour les sauvegarder.
Il importe donc que l’ERAC, établissement public a vocation socio-économique, prouve cette fois sa citoyenneté en faisant une quatrième étude (en plus des trois études qu elle avait déja lancées pour justifier la construction sur le marécage) pour évaluer la rentabilité touristique et socio-économique de son projet ainsi que sa compatibilité avec les politiques nationales en matière de tourisme et de développement humain.
Parce ce que même sans étude, on peut constater qu un tel projet ne peut qu accentuer le phénomène de la pauvreté dans la région. Cette région n’a-t-elle pas droit a de vrais projets touristiques intégrés, de la nouvelle génération, qui peuvent absorber tous les chômeurs de la commune et dynamiser son économie ?
Abelmajid Nejdi
Lematin.ma