La raison : les autorités locales et municipales ont autorisé l’installation de stands commerciaux, tapageurs et chaotiques ; un marché public où on vend poteries, marchandises en plastiques et ustensiles de cuisines bas de gamme, ainsi que des voitures tamponneuses, autour du seul jardin public et espace vert d’Azemmour ! Pour alimenter tout ce commerce en énergie et faute de poteaux, ce sont les palmiers et les arbres qui servent de supports pour les files électriques, les disjoncteurs et toutes sortes d’interrupteurs. Sans aucun gène, on enfonce en toute impunité, au vu et au su de tout le monde, des clous de différentes tailles dans les palmiers et les arbres pour fixer toutes ces installations ! Pire, a l’occasion du mois de ramadan, des marchands d’épices moulent leurs denrées en face de leurs stands, en piétinant avec leurs clients qui attendent leurs tours, tout ce qui reste de vivant dans cet espace. Objets et différents articles sont déposés a même le sol sur ce qui reste d’un gazon mal entretenu. Une fontaine piteuse, qui n’a jamais vu couler une goutte d’eau, sert d’entrepôts et se voit transformée en étagères pour tagines, jarres,
Faute de toilettes publiques, ce sont les coins et recoins de ce qui reste de ce soi-disant jardin, qui servent de W.C. pour les marchands et les visiteurs. La canicule amplifie les odeurs et les senteurs de ce jardin qui se trouve au centre-ville, a quelques pas des riads où hébergent des touristes, et a peine a quelque 200 ou 300 mètres de l’hôtel de police et de l’annexe de la municipalité ! Façon efficace pour encourager le tourisme et les investisseurs !!! Un peu plus loin, vis-a-vis de ces stands, ce sont les remparts de l’ancienne médina qui sont a leur tour bien “arrosés” par les urines des passants et des commerçants. On urine sur les arbres du jardin, sur des monuments dignes d’être hissés au statut de patrimoine universel, sur le passé de la ville, sur sa mémoire et sur une histoire oh combien séculaire, oh combien glorieuse et forte d’enseignement !!! Bel exemple pédagogique, belle façon d’apprendre a notre progéniture de respecter la nature, la mémoire des ancêtres et l’histoire.
Qui a eu cette idée saugrenue, bizarre et ridicule, d’autoriser un tel commerce, des cafés maures avec leurs musiques assourdissantes et des distractions d’un autre âge, sur un jardin public, l’unique de la ville, alors que des terrains qui conviennent parfaitement a ce commerce se trouvent partout en dehors de la cité ? Où sont les élus fraîchement élus, ceux qui prévoyaient dans leurs programmes la protection de l’environnement, qui sont sensés arrêter de tels dérapages, de tels abus, et des décisions insensées qui nuisent au bien-être des citoyens ? Combien ce gâchis va-t-il co»ter au contribuable ? Combien la collectivité locale a-t-elle payé a ce jour pour entretenir ce semblant de jardin ? Les deniers publics n’intéressent-ils personnes ou s’éclipsent-ils devant des intérêts privés ??? n’oublions pas que parmi les 6 stations balnéaires du plan Azur, locomotive d’un nouveau genre de tourisme, il y a Mazagan Beach qui ouvrira ses portes dans peu de temps, et qui se trouve a quelques kilomètres a peine de la ville d’Azemmour. Et un touriste ne va pas la où il y a la misère, la saleté, le crime et les nuisances et désagréments de tous genres !!!
Azemmour n’est nullement un village où le plus simple des spectacles, le plus insignifiant et le plus vulgaire des commerces constituent un événement et une curiosité pour les habitants. c’est une ville possédant une histoire millénaire. Cette ville a des atouts considérables, jusqu a présent, et qui, pour des raisons inconnues, restent encore inexploités. Elle se situe a l’embouchure de l’oued Oum Rbia et possède une des plus jolies et vastes plages du Royaume, ce qui pourrait faire d’elle, et a peu de frais un des joyaux de la côte atlantique. c’est une ville d’artistes et d’artisans, donc de talents a exploiter et a faire valoir. c’est aussi une ville de religion et de soufisme, en témoigne son patrimoine riche en mosquées et zaouïas. c’est une ville qui, autrefois, suscitait l’intérêt de grands historiens. Alors pourquoi cette ville est-elle restée, malgré toutes ses potentialités, un lieu de charlatanisme, de prostitution, de crimes et de misère ? Pourquoi n’a-t-elle pas été hissée au statut d’autres villes qui viennent d’émerger, comme celle de M Diq au nord du Maroc qui s’est métamorphosée en si peu de temps, au point de ne plus la reconnaître ?
Le go»t de la nature
Un espace vert, un jardin, un parc, quelques arbres si insignifiants et peu nombreux soient-ils, ce n’est pas un simple luxe, un ornement, une simple promenade pour paresseux et oisifs. Non, c’est une nécessité, un besoin, un art au même titre qu un tableau de peinture ou une poésie ; un art et une géométrie où se mêlent la magie des formes, des couleurs et des senteurs. c’est un lieu sacré, un lieu de méditation et de vie, au point que le philosophe Cicéron y situe tous ses dialogues philosophiques. Plus qu un lieu de simple relaxe, c’est un espace propice pour l’imagination et l’esthétique de la personne. Il raffine les go»ts, amadoue et apaise les mœurs. Se trompe quiconque pense que c’est du simple ornement superflu pour une ville ! Emmener un enfant dans un parc’est très instructif, très formateur. part les formes, couleurs et odeurs déja évoquées, on développe chez l’enfant le go»t de la nature, donc de la vie, on éveille sa curiosité, on aiguise ses sens, on le prépare a la méditation. Bref, on le prépare au métier d’homme, car il est déja un homme en devenir. On l’éduque et on le prépare a la citoyenneté. Ainsi, il sera un homme a part entière, et non un sous-homme a la merci de la première dérive.
Un garçon qui n’a jamais senti une fleur, qui n’a jamais prêté attention au chant d’un oiseau, qui n’a jamais écouté une musique (et non du bruit !), qui n’a jamais regardé un tableau, qui n’a jamais lu un poème, qui ne s’est jamais émerveillé devant les ailes d’un papillon, est une cible privilégiée, une proie facile pour les idéologies obscurantistes. Le terrorisme ou la délinquance cherchent leurs victimes parmi cette catégorie d’adolescents, puisent leurs proies dans les bas fonds de l’ignorance, dans les zones de non culture.
Les enfants terroristes que notre pays a connus n’avaient-ils pas ce profil ?
Abdelmajid Nejdi
Le Matin