Fils de Mazagan (documentaire sur El Jadida)

Au moins il y a des raisons qui font de moi “fils de Mazagan”? Je connais tous les quartiers, rue par rue, de sorte que chaque rue est nommée par ses fils, et chaque quartier par son héro.

J ai couru tous les terrains, sauté les remparts, traversé a la nage de môle a la darse pour chercher dans les bateaux s’il y avait des sardines pour les griller au port ou quelques poissons a porter pour les manger ensemble au quartier.

J ai bricolé dans tous les métiers comme apprenti pour quelques centimes a la fin de la semaine afin d’aller voir deux films sans ticket au Cinéma Rif ou bien d’aller acheter le ticket de l’entracte pour voir le deuxième film au Ciné-Paris ; en laissant la grande salle de Ciné-Marhaba aux français et aux bourgeois de notre ville.

J ai joué tous les rôles, du rôle de spectateur au second rôle de tous les acteurs, des fois un vrai joueur et des autres un « nappeur », joueur qui joue avec de l’argent de celui qui dirige le jeu, pour encourager et épauler Père Wadoud et son adjoint Père Grundel qui gouvernent ce monde.

Ici, il y a beaucoup de raisons d’être fils de la ville, mais nous n’en avons toujours pas. Notre seule raison que nous avons encore été investie dans les murs pour enterrer notre culture et cacher leur malheur dans des belles voitures qui saturent la ville. Où sont enterrés nos saints ? Une question qui se pose pour chaque ville a l’age de la ménopause !

Les Saints de ma ville sont innocents, ils sont loin de toutes soupçons, leurs marabouts étaient notre refuge dans les heures grises, leurs dons étaient notre seul soin et remède de tous les maux de notre enfance. Nos saints sont des spécialistes, chacun a son bureau et chaque consultation a ses mœurs.

Si la femme enceinte cherche un enfant, elle doit se présenter entre le coucher de soleil et la tombée de la nuit, habillée en drap blanc et voile noire devant St Lalla Zahra et a la fin de cette consultation psychothérapeutique, la femme allume une bougie et met un peu de henné pour laisser des traces comme une signature sur un épitaphe, comme un compromis signé de henné, contraire a Faust qui a signé avec son sang son pacte avec le diable.

Et si cette femme, observe une amélioration, doit faire mieux, regarder en haut, suivre les codes et le phare et aller voir Père Sidi Bouafi pour une consultation générale dans une atmosphère amicale.

Le cas où, cette femme se sent de mieux en mieux, doit visiter le mellah et découvrir la recette des autres saints des coins qui sont cachés dans la Cité de la tolérance, la consultation ici demande un mouton ou une chèvre, ça dépend de l’orientation de la patiente et ses diagnostics détectés par ses voisines.

Si l’affaire va bien, et si cette femme arrive a voir de la lueur ; elle doit refaire le même parcours revenir chaque vendredi chez St Bouafi pour une visite de routine et une confession chez St Lalla Zahra, jusqu a ce que le bébé devienne enfant.

La, la femme sera obligée de prendre son garçon entre ses bras et le présenter au St Ahmed n’khal pour le protéger des pleurs de la nuit et les maux des dents, toute la consultation avec les frais de l’opération ne dépassent pas la somme pour acheter un clou de moyenne taille afin de le creuser sur le bois.

Si la santé du garçon se voit forte et bonne, elle doit prendre rendez-vous pour consulter St Dawi pour lui accorder une opération de circoncision le lendemain matin, et c’est le Père Jilali ou le Fils Dela Lima qui exécutent l’opération avec un peu d’argent et un coq.

La dernière étape c’est de confier tout ce qu elle a gardé et sauvegardé et protégé aux gardiens des écoles de la ville.

Et si le garçon va dans le mauvais sens, alors, la il y a les gardiens de la prison de Sidi Mossa.

El Bachir Boukhairat

Auteur/autrice