Ahmed savait qu il ne pouvait se confier a personne sur terre, sauf a son ami Salah. Ces deux acolytes étaient plus que des amis. Ils s’étaient liés d’amitié depuis leur bas âge. A trois ans a peine, Salah venait d’emménager avec sa mère et son petit frère dans ce quartier et Ahmed, lui du haut de ses 4 années, était déja le caïd des garnements de la place. Il faisait la loi, il faisait la pluie et le beau temps, il avait plus de jouets que les autres, il avait même un chien rien qu a luiTous lui vouaient un respect forcé par un charisme puéril, mais très évident. Vous rigolez, je sais que vous le faites, tout cela vous semble exagéré, or sachez, que même les enfants ont un code d’honneur, des règles de société, et plus encore ! On a tous vécu ça, mais dès lors que l’on a traversé les tranches d’âges, on a oublié. Moi, je suis toujours cette enfant que j ai été, et je me rappelle de mes plaisirs de maternelle
Je les vois toujours, ces deux la, bras dessus bras dessous, amis pour la vie, partageant tout, absolument tout. Salah s’était épris d’Ahmed dès le premier jour, quand ce dernier lui a offert un bout de son Maruja, lui qui était connu pour ne jamais céder une miette de son go»ter a qui que ce soit, même pas ses frères ! Ahmed, lui, avait eu ce geste en réaction au retrait qu avait Salah. c’était le seul qui n’était pas venu vers lui instinctivement, qui avait résisté a l’attrait qu offrait son amitié. l’exception fascine toujours, elle avait fait son effet sur les deux et depuis ce jour, ils étaient devenus inséparables. Chacun complétait l’autre, et l’autre le lui rendait par un amour fraternel qui grandissait avec eux, au fil des ans.
Ce matin la, Salah écouta patiemment son ami. Il tendait son oreille et ouvrait ses bras a un cœur brisé par la douloureuse épreuve du premier amour. Il se faisait expert, lui qui n’avait jamais encore rien ressenti pour une fille, et semblait bien maîtriser son art d’apaiser les battants meurtris. Ses yeux pétillaient d’un éclat jovial, dès qu une idée lui eut traversé l’esprit. Ahmed lui, parlait de sa bien aimée a ne pas tarir son vocabulaire élogieux, comme si les mots qu il prononçait étaient un baume qui soulageait ses maux. Il lui raconta comment, quelques jours avant, en rentrant de la piscine, il avait aperçu une fille près de chez lui. Nadia ! c’était une jeune fille de 17 ans, brune aux cheveux au noir d’ébène, avec un visage éclatant et des yeux en amandes dont les cils généreux accentuaient la splendeur.
Elle n’était ni grande ni petite, et avait une démarche hautaine, majestueuse et si féminine que pas un seul ne pouvait dégager son regard d’elle, lorsqu elle traversait les ruelles du quartier. Chaque été, depuis que sa poitrine a commencé a se former de rondeurs précoces pour son âge, et que les courbes de son corps avaient pris un coup de pinceau, elle était l’attraction de tous les garçons de la médina. Elle était belle, elle était si belle que toutes les mamans rêvaient a marier leurs fils avec.
Nadia était la fille de Ba Lahcen, un émigré qui avait quitté son bled quelque part au fins fonds de chichawa, pour rejoindre la France dans les années soixante. Elle était la cadette de trois autres jeunes filles, ses demi-sœurs, moins belles, et mois attirantes qu elle. Sans doute, cela était l’effet de sa mère a elle, une berbère qui du haut de ses quarante ans passés, avait gardé les traces d’une beauté typiques aux femmes de l’Atlas MarocainLes zayanes !
Le récit d’Ahmed dura peu longtemps, quand Salah l’invita a aller chez lui. Il lui prit la main, le tira de sa chaise comme pour l’extirper de ses tourments, et lui lança, toujours avec ce qu il faut d’aplomb et de dextérité a un professionnel :
– J ai ce qu il te faut ! Nadia sera a toi, dussé-je ne pas dormir tout l’été !
Riad Essbai
Eljadida.com