Said est descendant d’une longue lignée de fauconniers de la tribu Kwassem dans les Doukkala. Une tribu dont les ramifications s’étendent d’Ouled Frej a Oulad Amrane en passant par Zemamra et dont les membres sont réputés pour être des élus car ils parlent le langage des oiseaux
Assis avec son oncle Mustapha et son cousin Mohamed autour d’un thé, dans l’unique pièce de la demeure familiale, qui leur sert de lieu de vie, ils devisent sur l’état de la fauconnerie.Ils ont peur que cette tradition ancestrale se perde, ou devienne un négoce pour appâter faussement des touristes. Ils veulent, comme quelques autres, lui redonner ses lettres de noblesse avant que, si l’on n’y prend garde, elle ne s’effondre de façon irréversible
Et le mérite de la télévision marocaine, c’est d’avoir braqué ses caméras dans ce district très discret de la grande famille des kwassems, afin de témoigner. De montrer a ceux qui veulent en savoir plus, que la fauconnerie ne relève pas du mystère mais de l’art. Art, avec un grand A. Car, au départ, il faut aimer la nature, comprendre son langage, et parler la langue des oiseaux Et puis, de la patience, beaucoup de patience. Pour capturer un faucon, pour l’amadouer au début, l’apprivoiser par la suite et enfin pour en faire un complice merveilleux dans des parties de campagne où le plaisir est partagé entre le fauconnier et son compagnon Pas forcément pour chasser, mais juste pour le bonheur d’être ensemble.
Et les fauconniers d’Ouled Amrane, d’ Ouled Si Said jusque la timides et modestes, veulent sortir de l’ombre et devenir incontournables et ils peaufinent leur savoir faire, a l’aide de techniques venues d’ailleurs.
Mme Geneviève Boucherez, qui, dans les années 1940 habitait Zemamra, et que j ai connue par les émouvantes « Paroles de Mazaganais » de Mustapha Jmahri se souvient encore des scènes de chasse au faucon auxquelles participait le Caïd Moulay Tahar de Sebt SaïsElle s’en souvient comme si c’était hiermalgré son âge très avancé. « Nous avions été invités chez le caïd, m écrivait-elle tout récemment, où nous avons eu droit a un excellent repas, a la séance de thé, aux youyous des femmes et pour couronner le tout, il a fait faire une démonstration a un fauconnier attaché a son service. Nous nous sommes promenés vers les champs et la, le fauconnier était s»r de voir un oiseau planer. Ce fut le cas. Des pigeons cherchaient fortune. Le fauconnier lâcha sa bête, jusque-la encapuchonnée, et après avoir tournoyé un moment au dessus du vol de pigeons, le faucon piqua et revint vers son maître qui, après lui avoir parlé (sans doute le félicitait-il) le ré-encapuchonna Le pigeon vivait encore.» ( cf galerie de photos).
La fauconnerie était une vraie passion a l’époque, comme elle l’est encore aujourd hui pour quelques rares passionnés. Mais ils veulent qu elle retrouve ses fastes d’antan.
c’est ce qu ils ont expliqué a Omar Mrani, le réalisateur de l’émission, qui lui aussi s’est épris de cette tradition. Le récit qu il nous présente est non seulement un témoignage, mais aussi un engagement.
Cet engagement, c’est également celui de l’association marocaine des fauconniers Al Noubala, (AMFN), qui regroupe, sous la présidence d’honneur du Prince Moulay Rachid, la plupart des fauconniers de la région. Son secrétaire général, Abdellak Chaouni, s’emploie ardemment a son renouveau, avec notamment, la tenue, toute prochaine, d’un festival de la fauconnerie. Et l’an prochain, sans doute, se tiendront, pour la première fois dans l’histoire du Royaume, les grandes assises internationales de la fauconnerie puisque l’IAF ( International Association of Falconery ) a décidé de tenir a Marrakech sa conférence générale. l’association marocaine de fauconnerie, créée, 1983 sur les hautes instructions du Roi Hassan II est d’ailleurs la seule association représentative de la fauconnerie au Maroc a représenter le Royaume a l’IAF, qui regroupe 12.500 membres, représentant plus de 40 pays, dont l’Arabie saoudite, le Koweit, les Emirats Arabes Unis, mais aussi l’Angleterre, les Etats-Unis, la France, la Belgique, etc Cela sera alors la consécration pour les fauconniers d’Al Noubala.
Le ministère du tourisme veut aussi inscrire cette zone dans les circuits a développer, dans la perspective du plan Azur et de la station Mazagan.
c’est aussi dans ce cadre-la que se déroulera, du 30 avril au 4 mai prochain, a Oulad Amrane, le premier festival « Al Maya » des chants de femmes traditionnels, dédié a la femme rurale. Ce sera une grande première pour cette région un peu trop délaissée ; et malgré de faibles moyens, les organisateurs veulent faire le maximum: En marge des soirées réservées aux chants traditionnels, et des tables rondes sur l’histoire patrimoniale des doukkala, l’on pourra assister a des fantasias et des démonstrations de fauconniers locaux. Un festival est organisé avec le concours des communes de Oulad Amrane, Lahgagcha Kodiet beni Dghough, kridi et Tamda, et il est placé, comme il se doit sous les auspices de la Province, avec le soutien du Ministère de la Culture. Nous aurons l’occasion d’y revenir plus en détail ultérieurement.
En attendant, « Aji Tchouf », Venez voir les fauconniers de Zemamra sur la chaine Al Aoula, la première chaîne de la télévision marocaine: le dimanche 27 Avril, a 13h30 avec sans doute une rediffusion le lundi suivant a 23h40 et le vendredi d’après, a 15h45.
Michel Amengual
Eljadida.com